vendredi 28 décembre 2007

L'homme cynique

L'homme en question devint cynique le jour où il maudit son instinct pour la première fois. Parce qu'à ce moment là, il comprit, ou du moins il ressentit, qu'il était pitoyable. Ouais, ça a commencé comme ça, il réalisa la vérité, il réalisa qu'il était enchaîné à son instinct, et qu'il ne pourrait pas s'en débarrasser sans renier sa propre nature.

Face à sa propre impuissance, elle même face à lui-même, il s'est ouvert les yeux, pour regarder le monde, pour voir autre chose que son être qu'il souhaitait autre, et il prit conscience que sa misérabilité n'avait même pas la décence d'être unique; il découvrit des milliards d'autres êtres qui répugnaient son intellect.

Il vit dans tout le soi-disant mal du monde des hormones et de l'emotivité mal placés. Il regarda des enfants, purs et neufs, se faire des maux inguérissables dans les cours d'école. Il regarder des adolescents se rejetter, s'ignorer, se suicider. Il regarda des jeunes adultes se tromper, se mentir et se fair pleurer sans cesse. Il regarda des riches privatiser la terre, l'eau et le ciel, exploiter des pauvres de tous les continents jusqu'à la mort. Il regarda des guerres irraissonnées, des massacres, des génocydes et autres cruautés imprononçables, qui s'étaient commises par milliers de fois et qui se commettaient encore aujourd'hui.

Il regarda une humanité, il regarda six milliards d'humanités, en quête d'estime personnelle, de reconnaissance, d'amour et de sexe, s'entredéchiqueter sauvagement. Il était dégoûté.

Un instinct de survie, un instinct de reproduction, qui était censé assurer la continuité de l'espèce, un peu d'évolution, et ça donnait un animal social tellement intelligent, qui voulait tellement survivre et se reproduire, qu'il était prêt à tout. Elles étaient là, les racines de son cynisme : la société, son intelligence et son instinct.

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